Timbres et cartes postales sur DELCAMPE

Ny teny marina hoatra ny fia-pary, ka na lava aza, tsy lany hamamiana :
Les paroles vraies sont comme la canne à sucre que l'on mâche: quoiqu'elle soit longue,elle est douce partout.
Les timbres et cartes postales de ce blog sont en vente sur DELCAMPE.net , ci-dessous :

1960 25/28 Lettre de Nosy-lava

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Maison de Force
Nosy-lava le 21 octobre 1960 

Cher Monsieur Planchon,

J'ai bien reçu votre lettre du 19.10.1960. Je pense votre isolement ne vous déplaît pas, à moins que vous regrettiez le voisinage de M. BILBAO,puisque, paraît-il, vous étiez devenus d'excellents amis.
J'ai effectivement connu notre nouveau ministre.
Je ne sais pas si mon nom lui rappellera quelque chose.
Ma femme me dit que vous étiez en très bons termes avec lui.Si c'est exact, vous avouerez que vous avez eu de la chance, d'autant plus que vous connaissiez bien M. RAYMOND , son Directeur de Cabinet.
c'est avec plaisir que je verrai les "éloignés" s'éloigner de Nosy-lava car c'est une source d'emme......
Lettre sur Delcampe
Deux d'entre eux ont reçu une lettre recommandée qui ne portait aucune indication de l'expéditeur.
Comme il est d'usage, ces lettres ont été ouvertes par les intéressés en présence de CHRISTOPHE chargé de la censure, ceci afin d'éviter toute contestation quand au contenu. 
Ne sachant pas qu'elles émanaient d'un avocat,  il en a pris connaissance et s'est aperçu que ledit avocat  posait à des détenus des questions dont il aurait pu obtenir les réponses auprès de la Justice.
Ignorant si cet avocat était véritablement désigné pour assurer la défense des individus assignés à la résidence surveillée, j'ai cru bon de vous alerter par télégramme.
Si de tels cas se reproduisaient et pour éviter tout trucage, je crois qu'il serait bon de me faire parvenir le ou les noms des avocats désigné pour la défense des individus non condamnés qui se trouveraient à Nosy-lava; Sinon, je peux me faire rouler comme un enfant.
Le tour que vous avez joué à BARON me laisse béant d'admiration.Il va faire une drôle de bobine, lui qui se croit si malin.! .....
FELIX ne vas pas augmenter mes troupes de choc, mais il n'a pas l'air d'avoir mauvaise tête et je lui trouverai un emploi.
zébu
Vous me débarrasserez d'un comorien par la même occasion.
Le premier à éliminer est sans conteste ALI HAMIDI . Pour bien vous situer le personnage, voici son dernier exploit : il y a quelques jours, un habitant de Mahabo est venu proposer un boeuf.
Bien entendu, j'ai accepté, mais ne voyant rien venir, j'ai fait faire une petite enquête; J'ai appris que le fameux ALI HAMIDI avait intercepté le boeuf et l'avait revendu aux agents avec un certain profit naturellement; Et ce n'est pas la première fois qu'il agit ainsi.Alors, à dégager .....


(fin page 97)


J'espère que "Télescope" RAKOTOMANGA acceptera de venir ici.
Je lui ai d'ailleurs écrit à ce sujet, en lui faisant miroiter des avantages ...à peine exagérés;
en vérité, je ferai tout ce que je pourrai pour l'avantager, car c'est vraiment un champion au point de vue boulot, et pro-français, ce qui ne gate rien.
Je n'ai pas changé d'avis en ce qui concerne CHRISTOPHE,bien au contraire,.
Attendons encore un peu avant de le virer,  afin qu'il mette au courant son successeur de son classement un peu spécial. C'est vraiment un secrétaire, car il a des secrets bien à lui. A tel point que la plupart du temps il ne s'y retrouve plus.
Le petit mot de notre ami le Cdt CHABOT m'a fait énormément plaisir, mais je suis déçu qu'il ne se décide pas à faire un saut jusqu'ici. En dehors du plaisir que j'aurais à le recevoir, j'aurais beaucoup de choses à lui communiquer.
Vous lirez par ailleurs mes démêlés avec l'illustre CADENES . qu'il prétende n'avoir aucun compte à me rendre lorsqu'il débarque son personnel ici me choque profondément. car le dit personnel est recruté au hasard et très souvent renouvelé ; c'est un mélange hétéroclite.
Je vous serais infiniment reconnaissant de pondre un règlement intérieur - concernant l'accès au pénitencier- qui jusqu'ici n'existe pas;
Il faudrait surtout spécifier que toute personne débarquant sur le territoire du bagne doit obligatoirement se présenter au poste de police. sinon tout contrôle m'échappera; En possession de ce règlement je serais armé contre ceux qui prétendent enter ici comme dans un moulin.
vous me dites que l'ami VERGNOLE est souffrant.J'espère que cela n'est pas grave et qu'il pourra nous écrire la longue lettre qu'il nous a promise il y a déjà un moment.
Comment va Madame Planchon ? Est-ce que les enfants se sentent courageux en ce début d'année scolaire ?




Bien cordialement
Signé LUCAIN

P.S. Le grillage du valakira, complètement pourri, s'est effondré d'un seul coup. Est-ce que vous pourriez le remplacer, car l'époque où le poisson abonde approche. Cette fois nous le passerons au goudron pour le protéger.




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1960 26/28 Nossi-bé



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Il y a trop de détenus hospitalisés à Nossi-Bé.
c'est une situation que je ne peux admettre car beaucoup sont utilisés en main-d'oeuvre.
je suis donc amené à demander que ces "malades" soient rétribués par l’hôpital.

Voici quelques rapports :

.......

... 12 septembre 1960 :


Je soussigné FAMOHA, détenu à la maison de force de Nossi-Bé précédemment en convalescence à Ankarankely,
déclare avoir travaillé chez des particuliers, à la journée, lorsque l'état de ma santé me l'avait permis, pour pouvoir me procurer des sous pour mes besoins personnels, pendant ma convalescence à Ankarankely.
Je n'étais pas le seul dans ce cas , plusieurs de mes camarades travaillaient également lorsque l'occasion leur permettait;
déclaration faite en présence du brigadier RAZANAKOLONA et de l'inspecteur principal VOAVY Augustin.
Joseph RASETA


...... Nossi-Bé le 16 novembre :


J'ai l'honneur de vous adresser à toutes fins utiles, la liste des détenus hospitalisés.
Il me semble que certains "malades" pourraient être utilisés, dans l’intérêt de l'administration pénitentiaire, c'est à dire en cession payante.
je vous avais signalé en novembre 1959 et juin 1960 , ces abus.On me trouve un peu trop "règlement" ici; aussi je ne veux pas renouveler près du médecin inspecteur les doléances que j'ai formulées deux fois en pure perte. aussi je désirerais que votre éventuelle intervention près du service de santé, ait été provoquée par les déclarations de tiers désirant garder l'anonymat.
Je crois devoir ajouter que j'ai effectué hier soir, à 20h 30, le contrôle des détenus hospitalisés. les nommés JEAN-PAUL et MORAMANA étaient chez le médecin inspecteur CAILLE
ceci m'a été déclaré par le détenu ROBINSON , vieil habitué de l’hôpital et qui connaît donc fort bien tous ses camarades et leur genre de travail.




... Était jointe une liste de quinze détenus.




... J'ai l'honneur de vous adresser les renseignements complémentaires suivants concernant l'hospitalisation des détenus :
Le détenu MORAMANA a été employé en cession payante du 1er juillet au 31 août.
Il a été considéré comme malade par le médecin inspecteur à compter du 1er septembre 1960 bien qu'aucune inscription n'en fasse état sur le cahier des visites médicales.




..... les prétendus malades JEAN-PAUL et MORAMANA couchant dans la propriété privée du médecin-inspecteur CAILLE.




......


"Ma classe marche comme sur des roulettes"  m'écrit Madame LUCAIN le 1er décembre , mais le 2 décembre, c'est la déception .

Nosy-lava 2 décembre (soir)


.... Le courrier vient d'arriver et je vous remercie tout d'abord pour la levure et pour les journaux. J'en remercie aussi M. WILLMANN , dont le nom est inscrit, ainsi que pour les légumes.
Malheureusement j'ai la pénible surprise de constater que l'on me retient 3.500 francs sous le rubrique "retr; spéciale" et cela sans préavis.
Mao Zedong
Mao Tsé-toung
 Qu'est-ce que cela veut dire, ,je suis furieuse. Vraiment, c'est se moquer du monde. 
Un comptable malgache touche plus que moi. Après la lettre que je vous ai écrite hier, vous devez comprendre mon état d'esprit. Plus ça va et plus nous sommes dégoûtés.Nous n'avons plus de viande d'aucune sorte.
 Nous osons à peine prendre un poulet de temps en temps. 
Tout est hors de prix à Analalava , quand on trouve quelque chose, car il n'y a plus de tripes ni de choucroute en boite chez le chinois. 
Quel bled !




......




J'interviens alors auprès des autorités compétentes et tout rentre dans l'ordre.
Le 5 décembre, M. MATHEI me rend compte de sa visite à Fianarantsoa et le rapport de son agent  MAHAMOUDOU DAIMA ainsi que de son impression sur la situation de l'inspection de cette province.



(fin page 114)




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1960 27/28 Tuléar

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... Tuléar le 5 décembre 1960




J'espère que vous êtes en possession de ma longue lettre en date du 30 novembre et que, probablement samedi matin 3 décembre, vous avez reçu la visite de Monsieur RAJAONARIVONY , juge d'instruction à Tuléar.
La voiture N° 4484 F a été renvoyée à Fianarantsoa . Elle était conduite par le détenu Philippe REMENT avec l'autorisation manuscrite de Monsieur le juge d'instruction qui d'ailleurs voyageait dans ce véhicule avec madame. L'agent du service pénitentiaire MAHAMOUDOU DAIMA accompagnait le chauffeur.
MAHAMOUDO DAIMA, à son retour à Tuléar, hier soir dimanche, mm'a fait un rapport verbal circonstancié de son voyage et de ses impressions sur l'inspection de Fianarantsoa.
Il parait que le bureau est plein , comme le métro aux heures de pointe, et que ce n'est pas un marché, mais une véritable foire;  " il ne manquait que de la musique" m'a-t-il dit textuellement.
Monsieur RAKOTO Philippe n'était pas là mais en tournée à Ihosy , avec le greffier comptable  qui précédemment était affecté à la maison Centrale de Tuléar mais qui, parait-il est venu, lui aussi, grossir l'effectif pléthorique des bureaux de l'inspection de cette province. Je soupçonne ce qui s'est passé, monsieur RAKOTO Philippe  , pour lequel je ne vous ai pas caché ma sympathie, étant, sauf erreur, "un faible", s'est laissé manœuvrer par MOHAMED ABOUDOU, qui est un bon élément mais qui a besoin qu'on lui tienne les rênes courtes. En résumé il paraîtrait qu'il y a au bureau : MOHAMED HABOUDOU, sa concubine mademoiselle ROSE DE LIMA ( surveillante) une autre jeune femme (surveillante ...; de qui ?), le planton , le standardiste-réceptionniste, deux détenus, un vieux monsieur,le caporal DANIEL RAFANO ( précédemment à la Maison Centrale) et le greffier-comptable ( précédemment à la Maison centrale) . 
Mais alors ça fait une escouade !




CIRCAUTO
Circonscriptions autonomes
..............
En ce mois de décembre, j'ai de sérieuses difficultés avec l'inspection provinciale de Tuléar.
Monsieur CADY de retour de congé veut reprendre son poste.
Il a l'appui de nombreuses personnalités mais M. MATHEI n'est pas disposé à lui laisser la place.
Monsieur CADY écrit le 6 décembre au Ministre de la justice la lettre ci-après et le 9 décembre c'est à nouveau M. MATHEI.

..... Tananarive le 6 décembre 1960


Comme suite à notre conversation de ce main je tiens à préciser que, ainsi que je vous en avis donné l'assurance, je n'ai rien tenté à l'encontre de M. MATHEI ni fait aucune démarche de nature à compliquer  une situation déjà fort délicate.


Bien au contraire. Car au cours de l'entrevue que j'ai eue avec Monsieur PLANCHON  après avoir été reçu par vous, j'ai suggéré que nos attributions dans la province soient partagées et que M. MATHEI soit chargé de l'inspection des prisons de la CIRCAUTO de Morondava qui, en raison de
son éloignement de Tuléar dont elle est coupée durant plusieurs mois par suite des pluies, échappe pratiquement à tout contrôle effectif.
Monsieur PLANCHON s'était montré très favorable à cette solution qui présentait l'avantage de recaser M. MATHEI en sauvegardant son amour-propre et d'améliorer l'efficacité de l'inspection pénitentiaire dans cette immense province.
Vendredi dernier je suis retourné près de monsieur PLANCHON qui m'a appris que M. MATHEI avait fort mal accueillie l'annonce de mon arrivée à Tuléar et déclaré qu'il "ne voulait pas me voir"....


J'ai su dans le même temps que la solution d'affecter monsieur MATHEI à Morondava n'avait pas été retenue et que monsieur PLANCHON envisageait de le prendre près de lui à Tananarive.




.;;


(fin page 115)




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1960 28/28 Tuléar









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... Tuléar le 9 décembre 1960


Je joins cette lettre à la correspondance destinée au service de l'administration pénitentiaire proprement dit. 
Vous trouverez parmi celle ci une copie de la lettre adressée à monsieur le Procureur de la république m'invitant à me rendre en inspection à Ankazoabé.


Il est évident qu'une tournée d'inspection s"impose tant à Ankozoabé qu'à Morombé et Morondava pour ne citer que les points névralgiques.


Morombe


Je suis en relation constante avec monsieur KORMANN , messieurs CAPDEVIELLE et JACOB du génie rural.
Si le service pénitentiaire  a la chance de me confirmer dans mon poste de Tuléar je peux assurer que le jardin ( champ ou camp, comme vous voudrez)  pénal sera l'un des plus beaux et des plus modernes de Madagascar sous six mois mais si, à l'instar de la 4ème république où les hommes de bonne volonté ne pouvaient rien faire, par suite de l'instabilité ministérielle permanente ,je suis, à nouveau changé de poste alors "adieu veau, vache,cochon,couvée".




.......




Le 6 décembre M. LUCAIN est satisfait du retour de son fidèle adjoint M. GOZIE.
Le 8 décembre c'est Nossi-Bé qui m'intrigue à nouveau en me signalant une situation trouble à Diégo.


... Nossi-Bé 8 décembre 1960
...  Le détenu que vous me signalez n'est pas à sa place ici.
Il est impossible de l'isoler puisqu'il n'y a ici qu'une cour commune, hélas ! et un petit quartier distincr pour femmes mais il est occupé.
Il semble entretenir d'excellents rapports avec le détenu que je vous ai signale par ma N° 1350 MF du 2 septembre et que je désirerais envoyer à Nosy-Lava avec les autres condamnés qui attendent leur départ depuis plusieurs mois.
De qui se moque-t-on à Diégo?
Je croyais que cette catégorie d'individus était destinés à Nosy-lava.
iln'y apas à compter sur les agents.
La plupart ont besoin d'être surveillés.
Le greffier-comptable RAVELONAHINA Désiré est complètement nul.
Il tenait très mal la situation des crédits.
J'ai du rappeler le détenu qui s'en occupait précédemment et que j'avais mis à la disposition de maître BOULANGIER huissier.
Par ailleurs puisque vous envisagez votre départ je dois vous dire que je désirerai quitter moi aussi cette source de soucis continuelle. 
 Il faudrait toutefois que je puisse trouver un autre emploi. 
Voudriez-vous avoir la gentillesse d'en parler à monsieur FOURNIER ? Peut-être grâce à ses nombreuses relations ......


... 17 décembre 1960


J'ai l'honneur de vous adresser copie d'une lettre de monsieur le Secrétaire d'Etat délégué de la province de Diégo, adressée à Monsieur le Chef de District.
L'application de ses instructions entraînerait de nombreuses difficultés.
Ce serait en outre préjudiciable à l'Etat qui devrait alors entretenir des centaines d'oisifs dans une Maison de force exiguë et qui n'a qu'une seule cour.
Que d'incidents en perspective si cette lettre n'est pas rapportée.
Vous m'obligeriez en me transmettant vos instructions dans les meilleurs délais.


(fin page 116)




************************************************

Ainsi s'achève l'année 196 qui fut fertile en évènements de toutes sortes.

J'ai eu beaucoup de travail et beaucoup de soucis mais aussi beaucoup de joies et de satisfactions.

Dans l'ensemble les détenus sont satisfaits du nouveau régime pénitentiaire qui leur permet de se livrer à des occupations favorites et apporte une amélioration de la nourriture et du confort.

De nombreux établissements pénitentiaires je reçois les bons voeux du personnel pour 1961.



l'encadrement et le personnel de surveillance a , dans l'ensemble, bien accepté les nouvelles disciplines et, si je fus quelque fois obligé de prendre des sanctions contre les plus récalcitrants, la majorité a confiance dans me direction.


Ce travail ingrat et ardu, a été reconnu par les autorités politiques et administratives qui m'ont félicité le plus souvent.

J'ai dû pourtant faire front à quelques ambitieux qui désiraient prendre ma place.

Ils y réussiront en 1961, lorsque, pour des raisons de santé de ma famille, je serai amené à abréger mon séjour.


FIN année 1960

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1961 1/ NOSSI-BE ; Nosy-lava

1961


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L'année débute avec des ennuis le 3 janvier concernant l'attitude du greffier de Nossi-Bé.
En voici le compte-rendu et un télégramme du 9 janvier :




Amiral DE HELL
Commandant PASSOT
Commandant de corvette JEHENNE







J'ai l'honneur d'attirer à nouveau votre attention sur le greffier au sujet duquel je vous ai adressé tout récemment une lettre manuscrite.

Il ne tient aucun compte des ordres qui lui sont donnés.
Il s'absente très souvent du bureau pour aller en ville sans en avoir reçu l'ordre ou l'autorisation.
Son attitude équivoque me permet de supposer qu'il se livre en ville à des occupations qui n'ont aucun rapport avec ses fonctions.

Il ne revêt qu'une tenue kaki sans attribut, ni casquette, de telle façon qu'on peut le prendre pour un ex-militaire retraité ( en dépit de mes ordres évidemment).

Il n'a aucune aptitude pour le bureau, ainsi que vous pourrez le constater par la lettre ci-jointe qu'il m'a remise hier spontanément.
4)
Ce matin il est venu à mon bureau me tenir le langage suivant :  nous avons appris que vous désirez remettre au bureau l'agent PASCAL.
Nous ( il voulait sans doute dire "moi") nous voulons l'agent RABAROELINA.
J'ai en conséquence l'honneur de vous demander la mutation d'un fonctionnaire suspect, indésirable dans l'administration.
Je désirerais conserver ici les agents VOAVY, JOSOA; ce sont deux bons éléments.
Max se met lentement dans le bain mais je crois qu'il sera un bon élément.








.... Nossi-Bé le 9 janvier de VICE-PRÉSIDENT DU TRIBUNAL à DIRECTION DE MAISON DE FORCE DE NOSSI-BE :


Honneur vous demander bien vouloir mettre à ma disposition les dimanches et jours fériés les détenus RASOLOFOJON F. Régis et AVILINITRY Georges pour les besoins du service.




....




Cette demande me parait pour le moins suspecte car je ne vois pas quel service administratif  peut avoir besoin de détenus le dimanche et jours fériés.
Je précise alors que s'il s'agit de besoins pour la vie personnelle du juge, ils peuvent être détachés dans le cadre légal et moyennant paiement;




Le 5 janvier tout parait calme à Nosy-lava :


....


Les moteurs flanchent les uns après les autres. quand ce n'est pas le moteur lui-même, c'est la génératrice qui demande grâce.
Il y a trop longtemps que nous faisons les acrobates pour les faire durer;
Mais il n'y arien à faire contre la "vieillerie".
Vous nous demandez le volant pour réparer les pièces du moteur Alsthom. Ce volant pèse plusieurs centaines de kilos et il faudra au moins trois mois pour qu'il vous parvienne et autant pour nous revenir.A ce train,  j'ai bien peur que les deux moteurs encore en course ne nous laissent tomber avant. Je crois que le mieux serait d'acheter un moteur neuf dès maintenant, risque à nous restreindre par ailleurs.
Depuis que la pluie  a commencé à tomber les jardins fournissent des brèdes à ne savoir qu'en faire.
Malheureusement cela ne remplace pas la viande.
J'ai commencé un élevage de lapins qui laisse bien augurer.
L'herbe et le son ne me coûtent rien et il n'y a guère qu'un peu de paddy qui soit mieux.


...


Au moment de terminer ma lettre, GOZIE vient m'annoncer qu'un habitant de Tangerina nous a livré un boeuf. C'est toujours ça de gagné.






.......




Puis le 7 janvier M. MATHEI qui est toujours à Tuléar me fait part de ses difficultés qu'il confirme par lettre  :




B.P. 102
Tuléar le samedi 7.1.61
17h00



Monsieur le Directeur,

Faisant suite à notre conversation téléphonique de ce matin j'ai l'honneur de vous confirmer :
1.°/
que Madame MOSIN, femme d'un commissaire de police déjà assez haut placé, est licenciée de l'agence BNCI de Tuléar afin de donner sa place à Madame CADY.
2.°/
que Monsieur CADY est déjà logé par l"administration ça c'est fait à une vitesse record. Il y a des administrations qui attendent des mois lais LUI, le "caïd" CADY , a eu une case en une semaine, ce qui ne m’empêche pas de penser, par son comportement, qu'il doit avoir "une case en moins".
monsieur MALLET chef des services provinciaux de sécurité et de police, s'est chargé d'informer , incidemment, le commissaire MOSIN que la lettre, que monsieur Caïd avait envoyé à Monsieur LOTA, était entre les mains de monsieur PLANCHON.
J'espère que le signataire en ressentira une "grande joie".
bien sur je ne connais pas la teneur de cette lettre ignoble, pour employer votre adjectif, mais peut-être serait-il possible de lui donner une publicité restreinte auprès de M. RESAMPA , par exemple, ou (et) de Monsieur le Ministre de la Justice.




A suivre




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1961 2/ Tuléar

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Suite d'une lettre de M. MATHEI
Tuléar 7.1.61


Personnellement je pourrai fort bien en transmettre une copie à monsieur Le Ministre BOTOKEKY.
Évidemment, ne connaissant pas le contexte de cette correspondance ce n'est qu'une suggestion.
Vous devez bien penser que cette situation paralyse mon activité.
Je n'ose rien entreprendre de sérieux.
a la suite du cyclone de faible intensité, que nous venons de subir, la cour de la maison centrale étant en partie inondée ainsi que deux dortoirs, j'ai évacué 60 détenus dans les 3 cases construites récemment au champ pénal.
Monsieur Le BIHAN est outré et je le comprends;
vous aurez tous les renseignements par ce même courrier, c'est à dire lundi après-midi.
Mercredi je suis à Morombé (si le temps le permets).
En recevant l'état nominatif des détenus de toutes catégories, du mois de décembre, à Fort-dauphin, j'ai constaté que le sieur MANERA DAVIDSON , condamné à 10 ans de réclusion, libérable en 1965, était toujours dans cette maison d'arrêt, malgré votre lettre formelle, rédigée pendant mon séjour à Tana, entre le 13 et le 16 décembre.
Il est vrai qu'il doit être protégé par le nouveau citoyen malgache Monsieur RA-DOYEN ( chef de district) , et ... Vive l'empereur .... Malgré ceci je me permets de vous suggérer de renouveler votre ordre , surtout si monsieur caïd doit prendre la zone sud.
Je vous prie toujours de croire, monsieur le Directeur, en mon entier et complet dévouement et à mes respectueuse affections.


signé MATHEI






page 121


Le 12 janvier l'inspecteur de Diégo a quelques problèmes avec l'administration provinciale que j'aurai la possibilité de résoudre rapidement et monsieur MONJOL restera sur place.



....

J'ai hésité à vous écrire , mais je décide aujourd'hui de vous mettre au courant de ma situation à Diégo.
En effet, vous avez été très chic de m'accorder votre confiance en me prenant au service pénitentiaire à mon arrivée à Madagascar.
Vohémar
vous m'avez très bien noté par la suite, et maintenant vous voyez que M. ARIDY tient à me remplacer à l'inspection du service pénitentiaire.
Vous devez vous demander quel est le motif de cette mutation.
A mon avis c'est que je me suis montré trop strict dans l'application de notre réglementation.J'ai peut-être eu tort.
En effet j'ai rappelé au chef de district de Vohémar qu'il ne pouvait demander au gardien-chef de faire assurer la garde de la caisse de l'agent spécial par notre personnel.
J'ai adressé une copie de ma correspondance au secrétaire d'Etat.
Ambanja
Capucins d'Alsace


Plus tard, j'ai du également écrire au Chef de District d'Ambanja qu'il ne pouvait demander au gardien-chef de mettre des gardes à la disposition du Chef de Canton pour le recouvrement des impôts.
M. ALLAIN est venu  lui-même me demander pourquoi je m'opposais à ce que le District d'Ambanja
utilise parfois des gardes pour le recouvrement des impôts.
 Je lui ai répondu que les instructions que j'avais de mon ministre s'y opposaient. 
Ici même à Diégo, j'insiste lorsque M. ALLAIN me demande au téléphone de fournir une corvée de détenus, pour savoir quel est le service qui remboursera la cession. 
Tout cela ne leur fait pas plaisir.
Enfin j'estime que ce n'est pas grave pour moi, et que vous ne m'en voulez pas de n'avoir pas su satisfaire les deux administrations.
Jusqu’alors  M. SENEZ chef du service provincial des finances, n'est pas au courant qu'on projette de m'affecter à son service.
Je le saurai lorsque M. DOMENGER sera arrivé.




....


Puis les 13,17 et 24 janvier la situation à Nossi-Bé fait l'objet de nombreuses correspondances relative à l'utilisation de la main d'oeuvre pénale :

...
J'ai l'honneur de vous rendre compte de ce qui suit :
Etant fréquemment dérangé par M. H. de LASTELLE , cet éternel mécontent qui se plaint toujours de n'avoir pas suffisamment de détenus pour l'importance de ses propriétés, couvrant, me disait-il, 150 hectares, j'ai cru devoir adresser le 9 janvier, au contrôleur des contributions une demande de renseignements.
Ainsi que vous le constaterez par l'examen de la réponse qui m'a été faite, M. Henri de LASTELLE m'a menti. 


Ile de Nosy-Komba


A la suite de cette vérification  j'ai adressé hier une convocation le priant de faire réintégrer la Maison de Force par quatre de ses détenus que je destine au Service des Eaux et Forêts de Nossy-Komba.
La répartition des détenus étant approximativement d'une unité par 20 hectares, ce planteur devrait donc avoir cinq détenus et non pas onze, alors que bien d'autres n'ont pas cette proportion.
Je m'étais efforcé de lui donner partiellement satisfaction mais devant d'incessantes démarches j'ai dû effectuer un contrôle qui s'avérait nécessaire.
Monsieur est venu me trouver ce matin à ce sujet et a manifesté un vif mécontentement;
Il m'a dit qu'il était victime d'une injustice et qu'il allait se défendre.
Je lui ai dit, en le voyant faire semblant de sortir un crayon de sa poche : "évidemment vous allez écrire, vous en avez d'ailleurs l'habitude" .
Il m'a répondu : " TSIRANANA et PLANCHON cet homme distingué vous pistonnent mais on verra bien".
Je l'ai interrompu par ces mots : "Ah! Ça me fait plaisir d'apprendre cette bonne nouvelle".
Il m'a assis en répliquant : " Oui, ils vous pistonnent, d'ailleurs c'est vous qui me l'avez dit un jour ..."
J'ai cru devoir rétorquer : " Mais  vous déménagez , monsieur".
Puis il est parti.


( fin page 121)


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....
J'ai l'honneur de vous communiquer quelques renseignements complémentaires relatifs au comportement social du planteur au sujet duquel je vous ai écrit ce matin.
Après vous avoir écrit j'ai fouillé dans les archives.
J'y découvert des lettres et rapports mettant en relief quelques unes des actions qu'il a commises alors qu'il assurait les fonctions de gardien-chef à Nossi-Bé.
 Si vous désirez compulser ces pièces vous constaterez que certaines lettres anonymes sont d'une écriture ressemblant à la sienne.
Rien de surprenant quand on connait tant soit peu cet individu sans moralité.
Ce n'est pas beau.
Il ne mérite aucun intérêt;


.... Nossi-Bé le 17 janvier 


...
Du gardien RA_DAVIDSON .....


 Comme ma demande a été refusée par le Directeur de la maison de Force car les pièces dont il est question n'ont pas passé par son intermédiaire, je me vois dans l'obligation de m'adresser directement à vous ....








Nossi-Bé le 24 janvier 1961


J'ai l'honneur de vous rendre compte de ce qui suit :
Ce matin vers 10 heures un planton est venu à mon bureau et m'a dit : 
" Faites attention car Henri de LASTELLE a parlé contre vous hier matin au Ministre ..."  ....
c'est vraisemblable car hier lundi 23 janvier j'ai été appelé au bureau du Chef de District à 15 heures.
J'ai été prié d'attendre monsieur ARIDY.
Quand il est arrivé j'ai vu tout de suite à son regard qu'il était prévenu contre moi.
Lui, habituellement souriant, m'a dit d'un ton sec qu'il était anormal de voir à Nossi-Bé, région touristique, des détenus (pouvant être un danger pour la population) travaillant à peu près librement.
C'est évidemment vrai.
Cette situation dure depuis de nombreuses années et la population en général ne s'en plaint pas.
Il m'a demandé si il y avait des agents de police partout où il y avait des détenus puis est venu brusquement sur le sujet qui devais le préoccuper car je me rendais compte qu'il pensait à autre chose.
-Connaissez vous M. Henri de LASTELLE ?
-Oui Monsieur le Ministre.
-Q'est-ce que vous en pensez ?
-C'est un personnage peu recommandable dont tous mes prédécesseurs ont eu à se plaindre.
-Pourquoi ?
-C'est un éternel mécontent qui réclame toujours des détenus  alors que les autres planteurs ne se plaignent pas car si tous lui ressemblaient la vie ici serait intenable.
-Pourquoi réclame-t-il ainsi ?
-Il croit probablement qu'il a des droits supérieurs.Si je lui ai retiré quatre détenus , c'est parce que je me suis aperçu qu'il m'avait menti en me déclarant posséder 140 ou 150 hectares alors qu'il n'en possède que 96.D'ailleurs il a encore 7 détenus au lieu de 5; Avant mon arrivée il en avait seulement 2.
-Bon, bon, alors ça va comme ça, mais depuis quand êtes vous là ?
'depuis plus de 18 mois Monsieur le Ministre.
Il s'est levé en me tenant le langage suivant : 
" Vous dépendez du Ministre de la justice mais j'ai tout de même mon mot à dire;
-Que voulez vous dire Monsieur le Ministre ?
-Travaillez bien ,travaillez bien !"
Et voilà.
il m'est impossible de continuer à travailler dans de telles conditions. Qu'on s'intéresse aux honnêtes gens me paraît juste mais si on s'intéresse à des demi-fous, où va-t-on ?
Mon successeur serait paraît-il , un nomme PHILIFAFRI ?
parmi vos nombreuses relations, peut-être vous sera-t-il possible de m'apprendre bientôt que vous avez un emploi de suite pour moi, de préférence sur les hauts plateaux ( ma femme est à plat 31,32 degrés dans notre logement) .




..




Monsieur AUDRAIN fut maintenu à Nossi-Bé.


(fin page 122)




Monsieur CADY a remplacé  monsieur MATHEI en qualité d'inspecteur de la région.


Ce dernier est maintenant mon représentant à Morondava .


Le 1er février il me fait part de son installation et attend la visite du président TSIRANANA.


Le 7 février il m'adresse copie d'une lettre très dure qu'il envoie au gardien-chef et le 10 il m'expose ses démêlés avec son remplaçant :






... Morondava le 1er février 1961 :


Monsieur RAKOTOMALALA est arrivé hier, 31 janvier, mais par avion.
Morondava
 Monsieur AMBERT, directeur des finances, s'était opposé à la location de la jeep, cependant promise par le chef du garage provincial.
Femme Merina et route de Morondava


Coïncidence M. AMBERT est un ami du ménage CADY et du dernier bien (qui est si près du  premier mal) de madame CADY parait-il.
Quoiqu'il en soit j'attendais trois employés et je n'en n'ai qu'un.
Je me pers en conjecture sur la manière  dont les autres vont pouvoir rejoindre Morondava d'autant qu'il n'y aura certainement pas un empressement particulier de la part de Tuléar à faire exécuter vos décisions.
MOHAMED SOILILAY , agent au service pénitentiaire, doit arriver le 4 au matin, avec les bagages, à bord du Norvégien III.




































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Le Norvégien III ne prend pas de passagers et c'est uniquement parce que j'ai fait charger sur ce navire 18 tonnes de ciment plus les bagages ( MAHAMOUDOU DAÏMA, MOHAMED SOILILAY et les miens) que par faveur spéciale cet agent a pu s'embarquer.
Je vais me mettre en rapport par un intermédiaire avec monsieur LE BIHAN afin qu'il puisse s'occuper de ces mutations.
.....




Monsieur le Président de la république, accompagné du ministre de l'intérieur , sera à Morondava samedi 4, pour introniser le préfet et un ou deux sous-préfets ( je ne sais au juste) dont l'ancien chef de district Monsieur LAÏLAVA ROBINSON.








.... Morondava le 7 février 1961 :


A monsieur le gardien-chef de la maison d'arrêt de Morondava :


Le vendredi 3 février vous avez assisté avec moi à la séance de mise au point de la réception de Monsieur le Président de la république, tenue par monsieur MIROUZE , au commissariat de la ville.
au cours de cette réunion il a été entendu que les détenus seraient consignés à la prison toute la journée du samedi 4 février et le lundi 6 février jusqu'à 10 heures.
Ma note N° 45-IPMORA , en date du 3 février 1961, dont vous étiez le premier destinataire , vous a confirmé cette mesure de sécurité.
Or, le 4 février 1961, à 21h45, j'ai trouvé dans la rue principale de la ville le détenu SOLO Alfred.
Je l'ai ramené personnellement à la prison et je vous ai fait chercher chez vous pour que vous me donniez toutes explications utiles.
vous m'avez alors montré une lettre manuscrite de monsieur RAKOTOMALALA Gabriel, greffier-comptable à l'inspection comptable de Morondava, par laquelle celui-ci vous demandait de lui envoyer le dit détenu qui lui servait de boy dans ses premiers jours d'installation.
Comme je vous exprimais mon vif mécontentement de cette inobservation de votre part des ordres donnés vous me répondîtes que "comme je voyais monsieur RAKOTOMALALA continuellement avec vous j'ai pensé que je pouvais lui donner satisfaction".
Je vous ai demandé si vous aviez un ordre signé de moi et vous fûtes obligé de me répondre NON.




Tournant votre colère contre le détenu qui n'était pour rien dans cette affaire, puisqu'il était sorti avec votre autorisation, vous avez voulu le faire coucher en cellule ce à quoi je me suis opposé.
Ensuite vous me dîtes : " demain je demanderai une punition pour monsieur RAKOTOMALALA" ce que bien sur, vous vous êtes bien gardé d'exécuter et de répéter à monsieur RAKOTOMALALA par la suite.


(Fin page 123)


En résume vous avez commis une faute grave en n'observant pas l'ordre catégorique qui vous a été donné par ma note N° 45APMONA et, au lieu de reconnaître les faits, qui sont probants, vous épanchez, sur mon compte, votre rancune aux 4 vents de la ville, ce que je ne peux tolérer plus longtemps.
Je vous invite donc à modérer votre colère, et vos propos d'une part,et, d'autre part de me rendre compte, si mes renseignements sont exacts, pour que ce même jour 4 février, autorisé le boy de monsieur le Juge à se rendre à son travail, chez son utilisateur.
Je ne désire en aucune façon monter cet incident ( dont les répercussions auraient pu être graves) en "épingle" mais je désire que vous sachiez que lorsque je donne un ordre, dont je prends la responsabilité, il doit être exécuté.
Je vous ai donné ma confiance et je la garde en espérant qu'à l'avenir je n'aurai qu'à m'en féliciter.




....




Morondava le 10 février 1961


...;
Je vous remercie aussi pour l'autorisation  que vous avez bien voulu me donner de faire fabriquer le mobilier nécessaire à mon logement.
comme vous me l'indiquez la facture sera présentée ...
Avant de répondre à la seconde partie de votre T.L.O. , je désire faire le point de la situation ici, et ce n'est pas brillant.
Ayant débuté à zéro, en dix-huit jours, je ne suis pas encore arrivé à 1 sur 20.
J'ai loué deux cases où beaucoup de travaux sont à faire.
J'ai commandé les meubles indispensables pour le bureau mais la livraison se fait avec une rare parcimonie.
Je possède à l'heure présente une table bureau et j'espère en avoir  une seconde dans le courant de la journée.
MAHAMOUDOU a mis à ma disposition quatre chaises (branlantes) en attendant l'arrivée, je suppose, par le même navire que la jeep, des six achetées.
Évidemment il n'y a pas de classeurs ( ils sont commandés) et les dossiers sont dans les coins des deux pièces occupées.
Le travail s'en ressent et ne peut être sérieux.
Tout  ça était à prévoir, car je le répète et c'est nécessaire, ici,il n'y avait rien tout est dons à organiser et la ville à 5.000 habitants.
En ce qui concerne la seconde partie de votre T.L.O.  vous m'écrivez :
 " monsieur CADY découvre et m'envoie des tas d'affaires que vous aviez laissé dormir à Tuléar".
Par discrétion, pour ne pas me peiner ( je vous remercie de votre délicatesse) vous me citez aucun exemple et me voici bien en peine pour reconnaître mes torts, comme j'ai l'habitude le faire lorsque les faits présentés sont exacts ou pour remettre les choses au point.
Quoi qu'il en soit, je me permets de vous rappeler que depuis la mi-novembre j'étais sur la sellette par les intrigues de M. CADY et qu'il est possible ( sans que cela soit certain  , n'ayant pas d'exemple) que certaines affaires m'aient échappées.
En ce qui concerne les 700.000 francs de factures "en instance" j'ai demandé à M. RAKOTOMALALA de me fournir toutes explications utiles.
Les voici :
" Toutes les factures arrivées après le 20 décembre 1960 devaient être liquidées sur le budget 1961.
Les gardiens-chefs ont été prévenus en temps utile.
Je suis formel, et les employés qui ont travaillé avec moi à Tuléar peuvent l'attester : le 20 décembre à 17 heures il n'y avait aucune facture en instance.
Toutes factures parvenues après cette date ont été classées dans une chemise à part avec l'étiquette " CRÉDIT 1961".
Monsieur CADY sera encore plus éberlué quand je lui enverrai d'autres factures emmenées pour le compte "zone nord" mais dont quelques unes sont antérieures à la date du 29 janvier 1961.


(fin page 124)































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Enfin, pour terminer, venons en à la question du personnel non permanent.
si ce personnel est non permanent c'est qu'il est provisoire.
Les difficultés et la lenteur du recrutement sont les causes principales de cet embauchage à la journée.
Un de ces employés devait faire l'objet d'une demande officielle de recrutement, RABENANDRASANA Jean.
Le maçon, ancien détenu,  et qui de ce fait ne pouvait être recruté, a été employé pour diriger la construction du tout-à-l'égout qui prolonge maintenant le puisard.
Le saviez-vous ?
Si le service pénitentiaire n'est pas "une entreprise de construction" il n'en reste pas moins qu'il doit faire face avec des moyens limités à la conservation des prisons et à leur amélioration ( construction de douches à Morombé, de réservoirs d'eau, de canalisations, etc...) et que dans de rares cas il es moins onéreux d'engager , pour un temps, un ouvrier qualifié que de s'adresser à une entreprise.....
Je signale que le tout-à-l'égout a été fait uniquement par la main d'oeuvre pénale , sous la direction du maçon ANDRE Marcel, et qu'il comporte, outre une canalisation d'environ 100 mètres de longueur, six regards en béton d'un mètre soixante de profondeur.
A Morondava, j'ai découvert un maçon (bon aide) et un menuisier que le gardien-chef ignorait.
je ne suis pas content de monsieur DAVID qui ne gagne ps à être connu.
Sa devise doit être "pas de vagues".
J'ai constaté que la fouille des détenus à l'entrée et à la sortie n'était pas pratiquée; que beaucoup de condamnés ne portaient pas le costume réglementaire.
Il a demandé une permission de trente jours que je vous ai transmis avec avis favorable.
S'il ne revient pas à Morondava, j'en serais pas fâché.
La majorité des détenus étant, ici, employée à l'extérieur le problème des constructions indispensables sont complexes.
je compte beaucoup, dans les trois mois à venir , sur les transferts pour étoffer cette main d'oeuvre.




......




M. LUCAIN , après quelques jours passés à Tananarive est de retour à Nosy-lava et le 9 février il me rend compte de la situation et le 13 il a encore de sérieux ennuis avec les gardiens et les détenus .


... Nosy-Lava le 9 février :


Je vous demande de me faire expédier le plus rapidement possible les graines nécessaires à l'ensemencement de nos jardins.
Il nous faudrait plus spécialement des graines de petsaï, de choux, de poireaux, d'oignons, de carottes, de salade, de persil, de tomates , etc..;,etc...;
pour notre consommation personnelle nous serions heureux de recevoir des graines de radis.


RAMPIRISON continue à faire des siennes.
Je vais aller à Analalava  dès que j'aurai déblayé le travail en retard et je mettrai les choses au point.
Mais je ne pense pas arriver à grand'chose.
A mon avis le mieux serait de le mettre seul responsable de la maison d'arrêt car je crois qu'il court au devant d'un coup dur et je ne tiens pas du tout à y être mêlé, même indirectement.
C'est un trafiquant né et ni vous ni moi ne l'en empêcherons.
De plus j'ai appris qu'il était parent à EUGENE ( qui entre parenthèses est un fieffé filou) .
GOZIE m'a signalé quelques anomalies qui se sont passées pendant mon absence et que je m'efforcerais de tirer au clair.
Voulez vous demander à PIERRE de nous expédier six robinets de 20 comme les trois qu'il nous a déjà fait parvenir.
ce robinets nous servent à soutirer les carburants.
Il nous en faut à l'atelier et sur chaque vedette.
Comme je le craignais, le volant est resté aux transports civils.
C'est révoltant mais je n'u puis absolument rien.
Vous savez pourquoi.
Je vous demande de faire activer si possible la génératrice du 50ch et de nous l'expédier de toute urgence car si un autre moteur tombe en panne nous sommes fichus.


(Fin page 125)



















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Nosy-Lava le 13 février 1961

Cher Monsieur Planchon ;

Je vous envoie par le même courrier le rapport concernant les deux lettres anonymes accusant RAMPIRISON ET MOUTARI des commettre des atrocités sur les personnes des détenus.
Bien que je ne puisse l'avouer officiellement , je crains fort qu'il y ait une certaine part de vérité dans les accusations portées dans ces lettres.
Je vien d'interroger le détenu INITRIKY Wiliam qui pendant quelque temps, travailla comme bureaucrate sous les ordres de RAMPIRISON.
Il affirme avoir assisté à la raclée infligée au dénommé RAMAHOLARY Edouard , l'instituteur dont je vous parle dans mon rapport.
MOUTARI lui aurait vraiment distribué plusieurs coups de cravache, et ces faits se reproduiraient assez souvent.
Le même détenu confirme également ce que j'ai entendu dire plusieurs fois : RAMPIRISON et MOUTARI s'entendent comme larrons en foire et trafiquent constamment.
Le ciment que réclame RAMPIRISON ne servirait pas toujours à la construction de sa case.Je vais faire une enquête à ce sujet.
Il arrive très souvent, paraît-il, que des amis des deux acolytes reçoivent de la main d'oeuvre pénale gratuite.
Ceci m'amène à vous parler d'un fait dont, pour une fois, je suis absolument certain :
Analalava
Type de femme Sakalave
Le détenu TSIAFINDRA qui s'est évadé il y a quelque temps ( et qui a d'ailleurs été repris) ne couchait pas à la prison ,mais chez son employeur, l'adjoint au chef de district, malgré les ordres formels qu'avait reçu RAMPIRISON à ce sujet.
Celui-ci a pourtant suivi de près l'action que j'ai menée pour que M. PRATI ne bénéficie pas d'u régime de faveur et que son détenu rentre coucher en prison chaque soir.Il ne peut donc prétendre ne pas avoir été averti et a agi en toute connaissance de cause. 
TSIAFINDRA dit qu'il n'était pas le seul détenu à coucher chez son employeur ; le boy du Dr PEYTRAL en faisait autant ainsi que plusieurs autres. Je vais essayer d'avoir confirmation de ces dires.
Je vous serais reconnaissant de donner l'entière responsabilité de la Maison d'Arrêt à RAMPIRISON car il m'est matériellement impossible de le surveiller d'ici.
Dès que j'arrive à Analalava en vedette je suis signalé et lorsque j'interroge les détenus , ils sont trop lâches pur me dire la vérité.Je suis absolument convaincu que RAMPIRISON et MOUTARI vont au devant d'un coup dur et je ne voudrais y être mêlé à aucun prix.Laissons donc ces crabes se débrouiller entre eux, le résultat ne  se fera pas attendre.
comme je vous l'ai déjà dit, je préférerais  avoir 15 ou 200 détenus de plus à Nosy-Lava et ne plus avoir à m'occuper d'Analalava.


Signé LUCAIN

(Fin page 126)


***********************
lettre :
 CONFIDENTIEL de RAINAIVO Joseph
Chef de Poste des Services Pénitentiaires
(Dactylographiée par l' émetteur, reproduite in extenso)


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Tsaratanana , le 13 février 1961

à Monsieur Le Directeur de l'Administration Pénitentiaire

= TANANARIVE =




Monsieur le Directeur,
Avec un grand regret je vous adresse la présente afin de vous permettre d'étudier et régulariser les effets suivants.
Vu l'article 18 du décret 59-I2I  sur l'emploi du personnel des Etablissements pénitentiaires . Il est utile que je vous expose mes cas si délicats ci-dessous.
1° Je vous demanderai que les agents des Services Pénitentiaires n'assureront plus la garde du Bureau Caisse ( Agent spécial).
( Participation à des différentes tournées) recouvrement des impôts, remettre des plis officiels dans les différents chefs lieux de canton.
Pour la bonne marche de service, je vous demanderai d'adresser à tous les Directeurs des prisons des notes pour notification relative à ces sujets.
Car nous trouvons des grandes difficultés pour disposer nos personnels sur le bon fonctionnement de notre service.
En vous signalant que nous avons : Le Poste de la prison et l’hôpital à garder ( Prison : deux agents et à l’hôpital :  un agent).
3° Aucun article du décret 59-I2I prévoit que les directeurs des prisons bénéficient des cessions pénales à titre gratuit? .
Je vous demande combien de détenus ils en ont droit exactement ? " à leur titre fonctionnel" Directeurs des prisons.
A mon intérêt tous Directeurs devront adresser des demandes à la direction SERVPENIT  pour utiliser des détenus  soient pour les entretiens des bâtiments administratifs.
Ils n'ont droit qu'une équipe des corvées tous les dimanches matins.
Soyez surs Monsieur le Directeur, car c'est pour la première que j'interviens à ceux-ci, pour le bon fonctionnement de l'Etablissement dont j'ai une grande part de responsabilité.
Je vous communique ma présente sans respecter la vie hiérarchique administrative, car je risque d'être rancuné.Par contre je suis dans l'obligation de vous signaler toutes ces ordres contraires et abusives, aussi enfin de me permettre conserver un bon rodage dispositif des agents sous mes ordres.
Peur d'être heurté d'une faute grave envers les disciplines de l'Administration pénitentiaire, je suis permis de vous adresser confidentiellement ma présente.
Ainsi, probablement je souhaiterai un jour votre visite ou inspection inopinée en notre établissement; En cas si ma requête ne sera prise en considération je vous demanderai d'être muté dans un poste plus important dans la province de Fianarantsoa.
dans l'attente de vous lire , je resterai toujours à vos ordres, mes salutations distinguées. 


Votre dévoué


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Autre lettre de RANAIVO


Monsieur Le Directeur,

RANAIVOARISON Emile commis-greffier destiné pour notre établissement installé le 9 février 1961 à son poste.
Je vous remercie infiniment d'avoir disposé ce personnel sous mes ordres.
Je vous demanderai selon votre haute générosité de faire sortir s'il vous sera possible ces notes demandées à tous directeurs des prisons, aussitô après la réception de la présente.
En vous signalant que notre directeur possède quatre détenus à sa disposition. C'est pour cette raison que je vous adresse ma présente personnellement et confidentiellement, aussi j'aurais soif de votre inspection inopinée à Tsaratanana pour mettre au point le mécanisme du fonctionnement de notre établissement, surtout pour examiner notre pauvre situation du point de vue bâtiments ( bureaux, logement des agents).
Le gardien-chef est logé dans une seule pièce de 4 m2.
Pour l'amélioration de cette situation, votre visite sera indispensable M. le Directeur ou bien vous enverrez M; M'inspecteur Provincial de Majunga.
j'ai l'honneur de vous rappeler ma demande concernant la bicyclette de notre établissement , laquelle vous aviez déjà notifié à l'occasion de mon passage à Tananarive. Je ne sais pas s'il s'agit d'établir une demande de projet à ce sujet.
En vous remerciant de la confiance que avez bien voulu me témoigner jusqu'ici, je vous prie d'agréer M. le Directeur mes respectueuses salutations et ma très haute considération.
Votre dévoué
Signé par tampon RANAIVO Joseph


Le pauvre Gardien-chef
Subordonné des ordres contraires




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(fin page 128)